On retrouve le collectif Oui au train de nuit et son délégué Bretagne, Iwan Le Clec’h, géographe et urbaniste, pour faire le point sur le retour de ce mode de transport écologique et économique. Le mouvement est sensible, en Europe et dans des territoires enclavés. Notre région a tout intérêt à suivre la voie du train de nuit.

Le site internet du collectif Oui au train de nuit

Iwan Le Clec'h délégué du collectif Oui au train de nuit-Bretagne

Depuis notre précédente émission, avec le collectif Oui au train de nuit, le dossier des trains de nuit a encore avancé ; même si la publication du rapport du gouvernement sur la politique ferroviaire, prévue pour le début d’année 2021, se fait encore attendre. Les fuites évoquent un projet de 10 lignes nationales de trains de nuit et 5 de trains de jour supplémentaires. La dynamique est donc favorable.

En avril, doit s’ouvrir la ligne entre Paris-Nice (3e liaison de nuit) et Paris-Tarbes en décembre. L’État travaille aussi sur les TET (Trains d’équilibre du territoire) Paris-Toulouse et Paris-Clermont-Ferrand. Dès que les distances sont importantes et en l’absence de LGV, l’ouverture d’un train de nuit peut être intéressante. Ces lignes sont rentables et peuvent être exploitées par des opérateurs privés.

Pour l’instant, la Bretagne n’est pas concernée par les projets gouvernementaux alors que Oui au train de nuit fait valoir que les liaisons aériennes entre Lyon et Lorient sont menacées, que l’aéroport de Quimper reste fragile, et que le train de nuit se substitue bien à l’avion. Le ministre des transports Jean-Baptiste Djebbari a néanmoins évoqué la possibilité d’un Lyon-Tours prolongé vers la Bretagne. Si on ajoute l’intérêt exprimé par le Conseil régional pour le ferroviaire nocturne et une grosse demande des Bretons (et Normands) en direction du Sud-Ouest (sans passer par Paris), on imagine comment pourrait se dessiner le développement des trains de nuit en Bretagne.

Engouement européen pour les trains de nuit

Surtout, le réveil des trains de nuit est un phénomène européen. L’Autriche, l’Allemagne et la République Tchèque s’y sont mises, soit par le biais du public (EBB en Autriche) ou de compagnies privées. Certaines lignes sont saisonnières (vers les stations balnéaires l’été, de ski l’hiver), d’autres fonctionnent toute l’année. Plus à l’Ouest de l’Europe, les liaisons sont internationales, entre Bruxelles et Vienne ou Innsbruck ou entre Vienne et Amsterdam.

Les intérêts du train de nuit sont multiples. D’abord, passer la nuit dans un train est nettement plus économique qu’un combo hôtel/avion, même en low cost. Quant au bilan carbone du train, il est 20 à 36 fois meilleur que celui de l’avion, selon les liaisons. Enfin, le train offre des possibilités d’arrêts intermédiaires que ne permet pas le transport aérien puisque les gares sont plus nombreuses que les aéroports.

L’engouement est tel que les constructeurs – de nouveau positionnés sur ces marchés – ne peuvent répondre à toute la demande. Donc, les rénovations de rames couchettes anciennes vont bon train. A Périgueux, le recyclage des voitures génère un millier d’emplois. Toutes les rames sont conçues pour être recyclées au moins une fois. La voiture est alors totalement revisitée et désossée ; on y ajoute électronique et wifi.

Le confort du train-hôtel

Le train de nuit version 2021 est assez éloigné de ce qu’il a été. On se rapproche davantage de l’hôtellerie que du simple transport, avec la possibilité d’individualiser son espace, des compartiments réservés aux femmes (comme en Espagne), des services de restauration, une amélioration nette des conditions d’hygiène (possibilités de douches). La clientèle s’est élargie, allant des étudiants aux cadres.

L’opportune ouverture du marché du transport et du fret ferroviaire

La libéralisation du transport de passagers permet en outre l’entrée de nouveaux opérateurs, y compris atypiques, à l’instar de l’entreprise coopérative et citoyenne Railcoop (basée dans le Lot) qui prépare une liaison Bordeaux – Lyon. La coopérative (en Scic) intègre des collectivités locales car la réouverture de la ligne de train de nuit est aussi un enjeu d’aménagement local. Railcoop va d’ailleurs aussi se lancer dans le fret ferroviaire. Avec une force inhérente aux coopératives : Railcoop vise l’équilibre, pas une rentabilité élevée, contrairement à des opérateurs comme Thello-Veolia ou Flixtrain dont certains projets patinent ou ont échoué. Un modèle à suivre en Bretagne pour relancer des lignes comme Auray – Saint-Brieuc ?