C’est peut-être le thème le plus fédérateur entre les 27 pays de l’Union européenne : la culture.

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Par Maël Cordeau, président de Breizh Europe Finistère

Depuis quelques jours, nous savons que la ville de Brest est retenue, avec 8 autres villes françaises, pour obtenir le label “Capitale française de la culture en 2022”. Les résultats seront prononcés au printemps, et il n’y aura qu’une ville gagnante. Ce label a été lancé par le ministère de la Culture il y a quelques mois. Le but : valoriser les territoires et les pousser à se dynamiser encore grâce à une enveloppe d’un million d’euros. Par ailleurs, en tant que Bretonnes et Bretons fiers de notre région, il est tout à fait possible de soutenir Brest et de montrer l’engouement des Brestois au jury final, qui se tiendra fin mars.

Mais revenons à l’Union européenne qui, de son côté, a – par exemple – lancé en 1985 et sous l’impulsion de la ministre de la Culture grecque, le label de “Capitale européenne de la culture” (Athènes était donc la première ville à recevoir cette dénomination prestigieuse). D’autres labels coexistent aux côtés de celui-ci, comme celui de la capitale verte européenne, par exemple. Bien souvent, lorsque l’on parle culture et Union européenne, on pense aux “Journées européennes du patrimoine”, qui ont lieu en septembre de chaque année. Mais il existe beaucoup d’autres événements et appuis financiers.

L’Union européenne s’intéresse au milieu culturel depuis 1992

Effectivement, ce n’était pas évident d’intégrer un tel domaine à un projet presque exclusivement économique qui, chacune et chacun le sait, reposait surtout sur la création d’un marché commun. Mais le traité de Maastricht, signé en 1992, a souhaité apporter un nouveau souffle à l’Union européenne : l’apport d’une relative politique sociale, la création du Comité des Régions, un nouveau partage de compétences…tout cela a changé le visage de l’UE. C’est dans ce cadre que la culture devient alors un enjeu plus important. En effet, si les Etats et la population européenne ont toujours eu conscience de la force et de l’ampleur de leurs patrimoines culturels, il s’est alors agi d’en prendre soin et de le promouvoir. De cette manière, de grands axes ont été définis. On peut en citer quelques-uns : – contribuer au développement économique des secteurs culturels ; – renforcer le sentiment d’appartenance à un héritage culturel commun ; – faciliter l’accès à la culture sur le territoire européen ; – participer au rayonnement de la culture européenne à travers le monde. Les Etats se sont donc mis d’accord sur ces principes.

Moyens d’actions concrets des Etats pour défendre la culture au sein de l’Union européenne

Malheureusement, les Etats ont fait le choix d’adopter une politique assez sommaire, et n’ont pas souhaité déléguer de compétences en la matière à l’Union européenne. Ils demeurent donc les principaux acteurs dans ce domaine. Ainsi et en la matière, l’action de l’UE n’est pas juridiquement contraignante et ne peut donc forcer les Etats membres à investir de telle ou telle autre manière. Mais, globalement et comme je l’expliquais, les Etats mesurent le poids qu’ont leurs cultures, et s’engagent dans cette voie de la promotion culturelle et patrimoniale. C’est d’ailleurs l’exemple du nouveau label français que j’évoquais en introduction, et qui existait déjà en Italie et au Royaume-Uni, par exemple.

S’il n’y a pas d’obligations, il existe des aides : la Commissaire européenne bulgare, Mariya Gabriel, a à sa charge l’Innovation, la recherche, la culture, l’éducation et la jeunesse. Elle dispose d’un champ de compétences suffisamment élargi, qui permet de proposer et renforcer les politiques qui lui sont dédiées. Par exemple, elle dispose de l’enveloppe revalorisée Erasmus+, qui est un véritable atout dans le cadre de la politique culturelle de l’UE. Avec ce portefeuille, elle dispose aussi de l’enveloppe du programme Europe Creative, qui s’élève à hauteur de 2,2 milliards d’euros pour la période 2021-2027, et est par ailleurs en augmentation. Ce programme permet de soutenir la création d’emplois dans le domaine de la culture, et d’appuyer certains projets cinématographiques européens. Le soutien au cinéma passe aussi par le prix LUX, créé par le Parlement européen, et permettant de récompenser des créations cinématographiques européennes, comme cela a été le cas pour les films “Sami Blood” ou encore “Dieu existe, son nom est Petrunya”, que l’on a pu faire découvrir aux Finistériennes et Finistériens dans le cadre de projections-débats. Par ailleurs, les votants du prix LUX sont les députés européennes et européens ainsi que les citoyennes et citoyens européens.

Le rayonnement de la culture européenne et le label Capitale européenne de la culture

Tout le monde connaît l’Eurovision, né en 1956. (Attention, je précise que ce n’est pas une démarche de l’Union européenne !) A cette époque, l’idée des dirigeants politiques du continent était de créer du lien entre les Européens. C’est devenu le concours de chant le plus suivi au monde, pour son côté artistique bien sûr, mais aussi un certain intérêt géopolitique qui s’esquisse parfois plus ou moins en toile de fond. Mais l’Union européenne, comme évoqué plus tôt, s’est dotée du label de “Capitale européenne de la culture” en 1985. Les villes gagnantes ont pour obligation de rendre un rapport de résultats à la Commission européenne. Ces rapports ont permis de montrer que le label est un véritable catalyseur culturel, et surtout un immense bénéfice pour le tourisme.

Le label a pour but de toujours renforcer et mettre en lumière la diversité européenne, développer les villes et créer du lien entre Européennes et Européens. C’est aussi l’occasion de revaloriser les villes aux yeux de leurs citoyennes et citoyens, et de stimuler le tourisme. Les villes qui souhaitent se lancer dans le projet doivent candidater auprès du ministère compétent de leur pays, puis un jury rend son verdict. Les villes gagnantes disposent de 4 ans pour planifier leurs projets avant l’année effective. Il y a donc 2 villes de l’Union européenne qui sont sélectionnées par an. Depuis 2020 doit être candidate une ville d’un pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne. Ainsi, en 2021, la Serbie aura la ville de Novi Sad comme vitrine européenne de la culture, aux côtés de celles de Timișoara (Roumanie) et Elefsina (Grèce). Les villes ont donc une large gamme de possibilités. Par exemple, en 2019, c’était la ville de Plovdiv (2e ville de Bulgarie, avec près de 700 000 habitants), qui était capitale européenne de la culture. La ville proposait diverses expositions et événements, environ 500 en tout. Le but était de renouer les liens intergénérationnels, ranimer la culture, transformer les lieux culturels oubliés. Cela a attiré des centaines de milliers de visiteurs. A ce sujet, je souhaite d’ailleurs adresser un message aux jeunes qui nous écoutent (si vous me le permettez). J’ai eu la chance de me rendre à Plovdiv, cette année-là, dans le cadre d’un programme d’échange Erasmus+ : Erasmus+ et le label de capitale européenne de la culture sont intensément complémentaires, puisqu’ils célèbrent tous deux la diversité européenne (le slogan de l’UE n’est-il pas Unis dans la diversité ?) Bref, je vous invite à vous rendre en Roumanie, en Grèce ou en Serbie, en 2021, et si c’est possible ! En ce qui concerne la France, elle aura une ville désignée capitale européenne de la culture en 2028. Il y a déjà des villes candidates…et puisque Brest s’inscrit dans le concours national 2022, pourquoi ne pas se doter d’une ambition européenne, et se lancer pour 2028 ?

L’Union européenne n’a pas le pouvoir de légiférer de manière contraignante, à proprement parler, en matière culturelle. Mais elle peut participer au rayonnement de ses Etats membres grâce à de multiples dispositifs : il existe effectivement plein d’autres événements, comme la Nuit européenne des musées, ou encore la Nuit européennes des chercheurs. Il y a aussi la Fête de la musique, qui est devenue une fête d’envergure européenne. L’Union européenne, in fine, a adopté la politique qu’on pourrait qualifier de la carotte, à destination de ses Etats membres : contre une somme d’argent certaine, pousser ceux-ci à agir en faveur de la promotion culturelle.