Chaque carte postale réalisée dans l’esprit du début du XXe siècle met en scène celui ou celle qui a choisi le site avec ses proches et mentionne le nom du site en français et dans la langue originelle de la personne – Association Yiriba

Après « Jaurès cosmopolite »  l’association Yiriba, et l’ethnologue-photographe Benjamin Vanderlick poursuivent le voyage aux côtés des Brestois nés hors de France métropolitaine. En réalisant avec eux des cartes postales de la ville, destinées à leurs proches, ils nous proposent une autre vision de Brest. « Mes chers parents » s’expose actuellement à la médiathèque des Capucins.

Retrouvez les détails du projet Mes chers parents sur le site internet de Benjamin Vanderlick, ethnologue et photographe

La page Facebook de l’association Yiriba à Brest

Le projet précédent Jaurès Cosmopolite a favorisé les rencontres autour de la rue Jean Jaurès à Brest et donné envie à l’association Yriba et Benjamin Vanderlick de creuser les histoires de migrations et des liens entre Brest et d’autres pays ou avec la France d’outre-mer.
Le photographe-ethnologue souhaitait aussi s’intéresser à la transmission des histoires de migrations au sein des familles : par le courrier, les correspondances épistolaires, et dont il reste des traces dans les archives familiales « au pays ». Aujourd’hui, dans un monde de plus en plus numérique, on communique beaucoup, très vite mais finalement quelles traces conserverons-nous de ces échanges virtuels ? Une carte postale au moins, c’est du concret ; pas besoin d’électricité ou de processeur pour la regarder…

Les cartes postales : objets qu’on garde et qui racontent tant d’une ville ou de l’expéditeur

En réutilisant ce support, il s’agit aussi pour l’ethnologue de questionner les participants sur les souvenirs que leur évoquent les cartes postales, de savoir si ils ou elles ont déjà envoyé des cartes, à qui, qu’y avait il dessus, etc. Et si un dialogue se noue au sein de la famille sur des histoires de cartes postales, des histoires de migrations plus anciennes, des histoires de communiquer dans la migration auparavant, ce ne sera que mieux.

Une carte postale, c’est aussi l’image de la ville « en représentation » pour un public extérieur. Les esthétiques de ces cartes postales ont d’ailleurs beaucoup évolué au cours du XXe siècle (le siècle de prédilection de la carte postale). Et la manière dont la ville se représente évolue aussi : que cherche-t-on à montrer sur une carte postale ? Des vues dégagées, certes. Mais alors qu’avant la Seconde guerre mondiale, des personnes sont toujours ou presque présentes sur les cartes, les vues de Brest se désertifient à partir des années 1950 pour ne s’intéresser qu’à l’architecture et au paysage.  Ou bien si des personnes sont représentées, ce sont des archétypes : la bigoudène, le marin…

Mes chers parents a donc pour objectif de faire voir une Brest contemporaine, vivante, sur les cartes postales. Les personnes qui acceptent de créer une carte vont alors choisir un lieu qui représente la carte postale idéale de Brest, celle qu’ils ou elles souhaitent envoyer à la famille. Ils ou elles doivent aussi choisir de se mettre en scène, choisir leur cadre, leur position et trouver un.e amie.e pour faire la photo à leur place. Benjamin Vanderlick joue quant à lui l’assistant (qui prête le matériel) et il enregistre ce que les personnes ont à dire sur ces lieux, sur l’importance que ces sites ont pour elles, ce qu’ils représentent, etc.

Richesse des regards « venus d’ailleurs » posés sur Brest aujourd’hui

On n’est pas obligé d’être brestois.e. depuis plusieurs générations pour parler de Brest et être légitime pour en parler. Tous les participant.e.s ont en commun d’être né.e.s hors de France métropolitaine. Pour les uns, la place de la Liberté ou la gare évoquera une « belle ville » dans laquelle on est fier de vivre. Pour les autres, la rue de Siam et sa rectitude minérale évoqueront les villes d’ex-URSS où vivent encore les proches. D’autres encore apprécient l’exotisme des jardins (des explorateurs, du Conservatoire national botanique).

Si l’étrangeté n’est pas forcément visible sur le visage des participant.e.s au projet, le texte écrit en bilingue (français et langue maternelle) nous permet de nous interroger, de nous amuser, de nous faire voir encore une Brest cosmopolite, partagée par toutes et tous.

Les ateliers sont menés sur 4 territoires différents, auprès de personnes dites éloignés des démarches culturelles » : des commerçants, usagers-clients de la rue Jean-Jaurès de Brest, publics en lien avec le GPAS Brest ou avec la médiathèque Europe à Pontanézen qui va accueillir une exposition, avec les associations Ici femmes d’Europe et d’ailleurs et Abaafe, et des jeunes mineurs isolés étrangers ainsi que de femmes célibataires étrangers avec enfants en bas-âge toutes et tous accueillis au Port de commerce à Brest dans l’Hôtel Les Gens de Mer.

Environ 40 cartes ont déjà été présentées à l’occasion du festival Pluie d’images 2021 rue Jean-Jaurès, dans un restau à emporter de nourriture africaine et antillaise

Jusqu’au 30 avril 2021, une exposition coordonnée par la médiathèque François Mitterrand aux Capucins – Brest et le monde, cartes postales depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à nos jours – présente à la fois des cartes postales anciennes et celles du projet Mes Chers parents. On navigue aussi sur les mers du monde aux côtés de Charles Etienne (jeune mécanicien de la Marine) grâce aux lettres écrites à ses parents. Enfin, L’encyclopédie des Migrants ouvres ses pages des témoignages de vie de plus de 400 personnes à travers le monde.