Alors que la Présidence française de l’Union européenne commence tout juste, l’association Breizh Europe Finistère nous en explique les enjeux, tout en revenant sur les actualités européennes récentes.

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Par Maël Cordeau

Ce début d’année 2022 est riche en actualités pour l’Union européenne. Le début de la présidence française de l’Union européenne, l’élection de la nouvelle présidente du Parlement européen et l’actualité générale.

Le décès du président du Parlement européen David Sassoli et son remplacement par Roberta Metsola

Commençons par l’actualité démocratique récente. En 2019, après les élections européennes avait été élu au sein du Parlement européen son président David Sassoli issu du Parti démocrate italien, qui est un parti social-démocrate. C’est une figure politique importante en Italie. A savoir : le président du Parlement est élu pour un mandat de 2 ans et demi. Si depuis 2019, la majorité du Parlement est à droite, de manière traditionnelle les députés européens s’accordent pour choisir un ou une présidente issue de la tendance politique inverse de celle du président ou de la présidente de la Commission (en sus d’une autre sensibilité encore pour le Conseil européen, dans le cas présent les Libéraux avec Charles Michel) afin
d’avoir une pluralité politique aux têtes des institutions européennes.
Ainsi, le mandat de David Sassoli devait s’achever le 18 janvier dernier. Mais depuis plusieurs mois, il était malade et a été emporté par la maladie quelques jours avant l’élection. Un hommage européen a par ailleurs été rendu au Parlement européen de Strasbourg. Par conséquent, au cours de la plénière du mois de janvier, une nouvelle élection interne au Parlement européen a eu lieu. Pour rappel, les plénières se déroulent sur 2 ou 3 jours et les députés européens doivent y être présents pour débattre, amender et voter les législations.
Ainsi 4 personnes se sont présentées pour succéder au président Sassoli, parmi lesquels une représentante des Verts, une autre des conservateurs… Roberta Metsola, conservatrice issue du PPE, le parti majoritaire au PE, a été plébiscitée pour poursuivre la 9ème législature qui fait suite aux élections de 2019. Cette eurodéputée maltaise avait déjà affirmé à plusieurs reprises ses positions anti-interruption volontaire de grossesse, une position politique qui a pu surprendre, après le passage de Simone Veil à la tête du Parlement européen en 1979. Il convient néanmoins de rassurer les préoccupés et de rappeler que la présidente du Parlement européen ne peut pas utiliser le PE comme moyen de défense de ses propres opinions, puisqu’elle représente l’institution et l’ensemble des europarlementaires.

L’intervention d’Emmanuel Macron devant le Parlement européen

Dans la cadre de la présidence française de l’Union européenne, que l’on appelle par abus de langage PFUE. On devrait plutôt l’appeler PFCUE, pour présidence française du Conseil de l’Union européenne. Depuis le 1er janvier 2022, comme nous vous le disions le mois dernier, la France a pris la tête du Conseil de l’Union européenne, que l’on appelle aussi Conseil des ministres de l’Union européenne. Le rôle de la présidence est de fixer l’agenda politique de l’Union européenne pour une durée de 6 mois. Ensuite, c’est la Suède puis la Tchéquie qui clôtureront le trio de travail de cette période (puisque les présidences fonctionnent en effet par trio de pays membres). A ce titre, le président de la République française Emmanuel Macron est venu présenter les orientations de la PFUE devant les parlementaires européens.
Il n’a pas fait de grandes annonces lors de ce discours puisque l’on connaissait déjà les grandes orientations des 6 mois à venir. Il a commencé par rappeler son engagement européen et les valeurs communes qui font que nous faisons l’Union européenne à 27 Etats : la démocratie, le progrès et la paix. Le président a rappelé la nécessité de faire vivre et protéger l’Etat de droit et d’affirmer cette singularité européenne. L’occasion pour lui d’attirer l’attention des Etats européens qui font face à des reflux d’autoritarisme et ceux qui sont aux portes de l’Union européenne. En réaction aux débats sur l’élection de la nouvelle présidente du Parlement européen et ses convictions connues sur l’IVG, il a par ailleurs annoncé vouloir pousser au débat la reconnaissance du droit à l’avortement dans la Charte des droits fondamentaux, un texte fondamental pour les Etats de l’Union. En terme d’avancée sociale, un autre objectif, qui s’inscrit d’ailleurs assez dans la logique de la présidence portugaise de l’an passé, il a aussi parlé du chantier sur l’égalité salariale, ou encore de celui des travailleurs des plateformes numériques, un dossier déjà pris en main par la Commission européenne.
La seconde ambition de la présidence française repose sur la capacité de l’Union européenne à se doter d’outils efficaces, notamment dans la lutte contre le réchauffement climatique. En effet, il a rappelé la capacité de l’Union européenne de proposer une série de mesures pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, qui s’inscrit dans le fameux Green Deal de la Commission. Par ailleurs, un autre défi de taille est celui du numérique, et donc de la capacité des Européens d’innovation dans ce domaine face aux géants américains. Emmanuel Macron a dit vouloir hisser l’Union européenne au rang des champions mondiaux. Par ailleurs, et ce sujet est au coeur des discussions depuis le début de la crise Covid-19, le président est revenu sur l’indépendance que doit retrouver l’Union européenne afin de s’affranchir de certaines dynamiques géopolitiques et ainsi s’imposer face aux violences du monde et au poids des autres puissances.

Retour sur le sommet sur la Défense et les Affaires étrangères à Brest début janvier 2022

Le sommet européen qui avait lieu à Brest avait entre autres pour but de dresser les plans d’une stratégie de défense, d’industrie et d’indépendance technologiques au
regard des tensions mondiales. A ce titre, les ministres des affaires étrangères étaient présents afin de travailler autour de la géopolitique de l’Union européenne, un thème largement mis en avant depuis 2019.
Les discussions ont surtout vraisemblablement porté sur les grands enjeux de défense de la période pour les Européens, leur sécurité et leurs intérêts : la situation au Mali, d’autant plus difficile depuis le dernier coup d’Etat et la présence de forces terroristes que combattent encore les soldats français (un soldat français en est encore mort le week-end dernier, démontrant ainsi le lourd tribut que paient les forces armées françaises pour la sécurité de la zone), et bien sûr le contexte brûlant de l’Ukraine, les Russes menaçant à tout instant d’envahir la partie occidentale du pays, au prétexte de l’extension de l’OTAN et de l’UE toujours plus à l’Est. Les ministres auraient aussi évoqué la nécessité de construction d’une stratégie spatiale commune aux Vingt-Sept.
Emmanuel Macron a d’ailleurs également souligné ces aspects lors de son discours. Également, en termes de stratégie internationale et en coopération avec les institutions européennes, le président français a annoncé le prochain sommet dédié au continent africain, dans le but de réfléchir à un New Deal économique et financier avec le continent. Ce sommet aura lieu les 17 et 18 février 2022, et aura aussi pour objectif d’étoffer les discussions engagées lors du sommet brestois, notamment sur la question de la présence européenne au Mali (via la force dite Takuba).
Devant les députés européens, le président de la France a réaffirmé sa volonté de revoir les processus d’adhésion des Balkans occidentaux, et n’a pas fermé la porte à une Europe à plus que 27, évoquant la nécessité de complétion plutôt que d’élargissement. On pourrait en parler dans un billet futur… Le prochain dirigeant ou la prochaine dirigeante française devra répondre à cet objectif lors d’une conférence dédiée en juin 2022, le dernier temps fort de la PFUE.
Il y aura bien évidemment d’autres rendez-vous, notamment sur le sujet de l’investissement et la croissance en mars, le sommet du Conseil européen les 24 et
25 mars 2022 ou encore la clôture de la Conférence sur l’avenir de l’Union européenne en mai 2022.

Ce qu’on peut retenir c’est que les propositions sont fortes et vont être suivies pendant a minima un an et demi grâce aux suédois et aux tchèques. Et pour l’illustrer on a appris la semaine dernière que le trio était en phase sur l’universalisation d’Erasmus avec un accent précis sur les filières professionnelles et donc les apprentis. Il s’agit donc d’un travail commun qui signifie aussi que l’on peut co-construire une souveraineté européenne forte grâce à la contribution de nos souverainetés nationales respectives.