En travaillant avec la Maison pour tous de Penhars à Quimper, l’Université des sciences et pratiques gastronomiques de Quimper a imaginé une cantine populaire éphémère. Ce projet permettrait à toutes les populations d’un quartier de se réapproprier leur alimentation dans toutes ses dimensions.

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Une fois par mois dans Lem, on s’installe à la table de l’Université des sciences et pratiques gastronomiques (USPG) pour s’interroger sur la cuisine, l’alimentation au sens large, de la production à la dégustation… comme phénomènes sociaux, environnementaux, économiques.

La question de l’alimentation confisquée : une crise démocratique là aussi

Les mangeuses et mangeurs sont pris entre de multiples feux : des injonctions liées à la santé publique (5 fruits et légumes par jour), à l’environnement (trie tes déchets, ne gaspille pas, cultive ton jardin…), des décisions qui leur échappent largement quant aux modes de production agricole (largement dominés par les chambres d’agriculture et la FNSEA), de transformation des aliments (aux mains de grands groupes agroalimentaires) ou de distribution alimentaire (les quelques groupes qui contrôlent la grande distribution en France). Pour les plus démunis, s’y ajoute une hypocrisie de l’aide alimentaire complètement dépendante du système d’écoulement des surplus de l’agroalimentaire, avec l’obligation de défiscaliser et une « bonne aubaine » pour l’État qui se défausse sur 4 ou 5 grandes organisations caritatives.

On constate que l’alimentation concerne le domaine marchand ou caritatif mais plus tellement la sphère publique et encore moins la population elle-même… comme si la démocratie avait aussi disparu de la sphère alimentaire.

Il n’y a pas vraiment de politique publique globale de l’alimentation. Même localement, malgré l’apparition d’outils intéressants que sont les Pat, Projets alimentaires de territoires qui rassemblent tout/e/s les actrices et acteurs de l’alimentaire à l’échelle d’un territoire (de la commune au département). Malgré ces Pat, peu d’actions concertées et de véritables plans – avec une vision politique – ont vu le jour jusqu’à présent.

Comment permettre à la population de se réapproprier son alimentation ?

Pour permettre aux citoyennes et citoyens de se réapproprier ces questions, de les traiter à leur manière et d’y imposer leurs véritables besoins et envies, l’USPG s’interroge sur les outils de reprise en main alimentaire, par la base. D’où la construction d’un projet de cantine populaire éphémère avec la MPT de Penhars à Quimper. Le projet n’a pas pu voir le jour mais il reste dans les cartons et pourrait passer du rêve à la réalité un jour.

La demande est partie des habitants du quartier qui déploraient l’absence de restaurant. L’USPG et la MPT ont enquêté sur les attentes plus précises : une alimentation de qualité, certes, mais qu’est-ce-que ça signifie au juste ? Petit à petit, il est apparu que le besoin portait davantage sur un lieu où se retrouver, manger ensemble et pouvoir discuter. Le mot « cantine », sous-entend qu’on s’installe facilement, qu’il s’agit d’un espace public ouvert et accessible, le mot « populaire » qui lui est associé prend ici tout son sens.

Un lieu de nourriture et de convivialité mais aussi social, éducatif et culturel

La « cantine populaire » aurait certes pour fonction de nourrir les habitants, mais on pourrait lui ajouter bien d’autres missions entre le social, l’éducatif, le culturel :  fournir des repas à des Ephad ou des écoles du quartier, fournir des repas pour l’Aide alimentaire en y associant les associations de distribution, permettre aux étudiants de cuisiner, se former, se nourrir grâce à la cantine populaire.

Après l’expérience « éphémère » de la cantine, le projet pourrait grandir autour d’une association pour le maintien d’une cuisine nourricière, et mieux encore de l’installation d’une cuisine (par exemple en MPT) partagée avec les habitants du quartier : pour apprendre la cuisine, partager ses savoirs mais aussi fournir des repas pour les familles du quartier. Autour d’un professionnel, les habitants d’un quartier s’investissent dans cet outil pour le faire vivre mais aussi pour assurer le poste de cuisinier coordinateur de l’espace. On obtient ainsi à la fois un espace de rencontre culture – nourriture, ouvert aux partenaires culturels pour en faire un espace de liberté de parole et de construction collective, on peut envisager une programmation culturelle et proposer des formations professionnelles. La cantine populaire peut même à terme devenir un point d’attraction des habitants d’autres quartiers de la ville.