Le groupe cosmopolite de Tel Aviv, El Khat, nous fait entendre le Yémen en jouant sur des bidons et des boîtes de conserve.

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Groupe psychotrope

El Khat, vient de la plante Khat, une plante qui produit des effets psychotropes proches de l’amphétamine quand on mâche ses feuilles. On les trouve dans toute l’Afrique de l’Est et sur la péninsule arabique, et elle est assez répandue par la communauté yéménite immigré en Israël. Et justement, le leader du groupe est un Israélien d’origine yéménite. Il a choisi le nom El Khat pour une raison assez simple, le khat, c’est addictif, et ça tient éveillé, le groupe El Khat, aussi ! Ce fameux leader, c’est Eyal el Wahab, et à ses côtés dans El Khat, on trouve 3 autres musiciens, qui viennent, d’Irak, de Pologne, et du Maroc, pourtant le groupe est basé à Tel Aviv.

El Khat repose autour d’un concept simple, mais original. Faire de la musique avec des matériaux de récupération. Eyal récupère tout, boîtes de conserve, roues de vélo, bidons, tout ce que les gens jettent, pour lui ça a de la valeur, parce qu’il en fait de la musique. Un bidon en plastique, un pied de chaise, de la corde, avec du savoir-faire et les bons outils, t’arrives à une guitare. Sur la chaîne YouTube d’El Khat, il y a une vidéo, qui s’appelle Instrument Making, où on voit justement Eyal récupérer des déchets et les transformer pour arriver à un instrument à 2 cordes, qui sonne. À côté des instruments de récup, ils utilisent quand même quelques « vrais » instruments, guitare, trompette, darbouka, et synthés.

Pas de message

Le titre de l’album, c’est un assemblage de plusieurs références, « Alawi » ça viens du chanteur yéménite Faisal Alawi. Et le petit Op.99 à la fin, ce n’est pas parce qu’El Khat a sorti 98 albums avant celui-là, loin de là même. C’est tout juste leur deuxième. Op.99 c’est juste une façon d’attribuer à leur art le même respect qui est mis sur la musique classique occidentale. La référence à un chanteur yéménite ne vient pas de nulle part, depuis les débuts d’El Khat, le but est de faire de la musique proche de celle du Yémen. En créant El Khat, Eyal voulait reproduire les sons des rues du Yémen, les musiciens qui jouent avec ce qu’ils ont sous la main, ça peut être des boîtes de conserve ou n’importe quoi. Dans le premier album d’El Khat, Saadia Jefferson, qui est sorti en 2019, le groupe reprenait des chansons traditionnelles yéménites et ils les revisitaient dans un groove plus funky. Dans Albat Alawi Op.99, il n’y a que des compo originales d’Eyal el Wahab, et la couleur de la musique est beaucoup plus traditionnelle. Eyal n’a pas commencé la musique avec El Khat, déjà, il a appris en autodidacte, à la base, il était charpentier. Après, il a rejoint l’orchestre Andalou de Jérusalem, en tant que violoncelliste, sans même savoir lire la musique. Mais au bout d’un moment, il a eu envie de faire ses propres compositions, et de se reconnecter à ses racines yéménites. Eyal revendique ne pas avoir de message, il cherche juste à reproduire la musique populaire yéménite, mais il est aussi très attaché au fait de récupérer et réutiliser ce que les gens jettent.